vendredi 19 mars 2010

La porte du paradis



Apollon le prend pour un simple récipient;
Agrippa lui confère un statut supérieur;
la Bible le nie et lui substitue la côte d'Adam;
l'Église en fait un objet infâme;
dans le Coran, il est une terre fertile à labourer;
Rabelais l'érige en mur contre les invasions;
Lautréamont en fait la porte de la torture,
Courbet le nomme origine du monde;
Freud l'analyse comme négativité, absence de phallus;
Rank le rétablit en porte de sortie du paradis perdu, lieu du trauma originel;
Mauriac le craint et le qualifie d'abjection;
Eve Ensler le fait monologuer;

Almodovar réduit l'homme et l'y fait réintroduire;
Lichtenstein le pourvoit de dents et le transforme en tueur;
Lars Von Trier le filme en pleine automutilation, etc.
Qu'on le chérisse ou bannisse, il demeure stoïque, toujours-là, parce que c'est de lui que les humains viennent et c'est à travers lui que les hommes désirent retourner à leur paradis perdu. Vénérez-le ou haïssez-le, mais n'oubliez pas qu'il appartient à quelqu'un, à une personne qui le porte bien et qui doit en être fière.

vendredi 12 mars 2010

Caligula et la folie du pouvoir



J'ai assisté, cette semaine, à une très bonne adaptation de la pièce Caligula d'Albert Camus que j'ai relue récemment. Fidèle au texte et mis à part quelques anachronismes voulus qui se greffent bien dans le cadre, la pièce, mise en scène par Gill Champagne, s'ancre malgré tout dans l'actualité. La présentation, avec son décor amovible qui s'emboîte comme une cité perdue, ses acteurs désabusés et soumis aux caprices et à la folie de leur empereur, m'a fait réfléchir. Caligula n'est pas mort, il est à la tête d'un pays, d'une entreprise, d'une municipalité, d'un média, d'une confrérie, d'une église, d'une famille. Dans chacun de nous sommeille un petit Caligula. Comment faire pour ne pas le réveiller? C'est simple, ne jamais donner tous les pouvoirs à quelqu'un, sinon il finira par vous éliminer et par engloutir tout ce qui a autour.